Fermeture de l'université
L'université Paris 8 a
été fermée pendant plus de trois semaines, entre
le 15 avril et le 9 mai 2005. Ce véritable lock-out, unique dans
l'histoire de notre université, eut comme unique justification
le rétablissement de l'ordre, troublé,
selon les dires mêmes du président Pierre Lunel,
par une quarantaine de personnes du département d'anthropologie.
Les forces de l'ordre avaient pourtant procédé à
l'évacuation de l'amphi occupé par ces personnes
dès le 14 avril, et une partie d'entre elles étaient
traduites en justice.
Trois éléments majeurs caractérisent cette gestion de la crise :
- La fermeture fut prolongée de jour en jour ; le
président annonça, le 19 avril, qu'il avait pris la
décision de fermer l'université du 15 avril au 18 avril.
Dans un mail le 20 avril, il annonca que l'université fermerait
jusqu'au 23 avril réouvrirait ses portes le 9 mai.
- Les Conseils Centraux ne furent pas consultés ; au
contraire, le CA et le CEVU virent leur séance annulée
pour cause de fermeture. Le président n'a accepté de
recevoir aucune des délégations de personnels. En
revanche, la direction lança une pétition pour
demander le soutien de sa décision (pétition qui
aujourd'hui a disparu du site de l'université).
- Il est inquiétant de constater que la direction d'une
université n'a comme unique moyen, pour résoudre un
conflit avec une quarantaine de personnes, que la fermeture de
l'université sine die.
Comme l'affaire des tranches
horaires, cette affaire montre une gestion au coup par coup, un
déficit dans la communication entre la direction et ses
"sujets", la
déliquescence de nos Conseils, et le développement
d'un autoritarisme autosuffisant.
Mais à la différence de
l'affaire des tranches horaires,
la présidence a pu compter sur le soutien d'un certain nombre de
personnels enseignants et IATOSS, écoeurés par le
déroulement des crises précédentes du
département d'anthropologie (qui ont à plusieurs reprises
secoué l'ensemble de l'université), et qui ont
espéré que pour une fois l'exécutif saurait y
mettre un terme, fut-ce à ce prix.
Il est dans ce contexte d'autant plus
intéressant que le 10 mai 2005, alors qu'une
délégation des personnels mécontents de la
fermeture était entendue par le Conseil d'Administration et le
président, celui-ci, sans qu'on lui en ait fait la demande,
annonça solennellement qu'il ne fermerait plus
l'université et ne ferait plus jamais appel aux forces de
l'ordre, dans quelque situation que ce soit, pendant toute la
durée restante de son mandat.
* * *
Quelques faits
Des étudiants et des
enseignants du département d'anthropologie occupent un amphi
depuis trois semaines, en protestation contre le traitement fait par
l'université de leurs demandes de diplômes. Cette crise
externe s'accompagne également d'une crise interne au
département d'anthropologie.
Le jeudi 14 avril 2005 le président fait évacuer par
la police l'amphi en question. Selon ses dires, l'amphi est
aussitôt réoccuper.
Le vendredi 15 avril les usagers de
l'université
découvrent que celle-ci est fermée. Pour combien de temps
? Mystère.
17 avril. Quelques collègues explicitent publiquement par mail leur soutien en cette affaire à la direction.
Le lundi 18 avril de nombreux
personnels se retrouvent en AG spontanée devant
l'université. Aucun incident notable n'intervient. Les forces de
l'ordre stationnent devant l'université. Les personnels
demandent
qu'une délégation soit reçue par
le président ; celui-ci fait répondre qu'il est
occupé. Aucun des responsables officiels présents
n'accepte de nous dire quoi que ce soit sur la durée de la
fermeture. A la fin de la journée le bruit court que
l'université restera fermée jusqu'à la fin de la
semaine. Une AG des personnels est décidée pour le 20
avril à la Bourse du Travail de Saint-Denis. Le SNESUP Paris 8
émet une motion de protestation le soir même
réclamant la réouverture et demandant à ce qu'une
délégation d'enseignants soit reçue par le
président.
Cette semaine-là le site
de l'université et le courrier électronique
deviennent notre principale source d'informations.
19 avril. Journée prolifique. Le président publie
un communiqué annonçant qu'il a dû,
avec un infini regret,
prendre la décision de fermer l'université du 15 au 18
avril et qu'il espère que la fermeture sera brève,
un communiqué
pour indiquer qu'il a toujours défendu l'anthropologie.
Apparaît sur le site de l'université une motion de soutien
à la direction et un appel à signer cette motion
(disparue aujourd'hui). Dans la nuit le président publie,
toujours
avec un infini regret,
un communiqué annonçant la fermeture jusqu'au 23 avril, puis
un texte expliquant que 30.000 personnes étaient empêchées de travailler par une quarantaine de personnes.
20 avril. Le président publie par mail et sur le site
un communiqué dans lequel il annonce, que,
à son corps défendant,
l'université restera fermée jusqu'au 9 mai. Il tente de
faire accroire qu'il s'agit d'une fermeture d'une semaine, alors que
l'université, et en particulier la bibliothèque, reste
normalement ouverte à cette période pour les IATOSS et
pour permettre aux étudiants de préparer les examens ;
et, en cette période de LMD, pour permettre aux enseignants de
travailler sur les navettes du ministère.
Le même jour l'AG des
personnels réunie à la Bourse du Travail de Saint-Denis
vote une motion condamnant l'appel aux forces de police, demandant la
réouverture de l'université et la réception de
toute urgence d'une délégation des personnels. Cette
motion sera présentée en conférence de presse le
22 avril.
Les séances du Conseil
d'Administration et du Conseils des Etudes et de la Vie Universitaire
sont annulées. Les Commissions de Spécialistes,
chargées du recrutement des enseignants, se réunissent
comme elles peuvent, sans appui IATOSS.
Le jour de la réouverture de l'université, le 9 mai 2005,
une AG des personnels désigne une délégation au
Conseil d'Administration pour débattre des conséquences
de la fermeture sur les étudiants, les personnels vacataires,
des poursuites judiciaires lancées contre des enseignants, et de
la pertinence des moyens adoptés pour résoudre la crise.
Cette délégation sera reçue le 10 mai 2005 par le
Conseil d'Administration et le président. Seul le
président répondra à nos questions, le CA restant
muet pendant toute la durée de notre présence, sauf pour
protester "ce sont nos affaires" quand la délégation
mentionnera que le CA n'a pas été consulté pour la
fermeture. Le président s'engage de lui-même à
ne plus jamais ni fermer l'université ni même faire appel
à la police "dans quelque situation que ce soit" pendant
tout le reste
de son mandat (on ne lui en demandait pas tant).
Table
des matières : les textes par
ordre chronologique