Préavis de grève administrative
à l’institut d’enseignement à distance
Nous, enseignants-chercheurs de l‘institut d’enseignement à distance (IED) de Paris 8, tenons à alerter solennellement les membres du conseil de l’IED ainsi que la présidente de notre université des multiples dysfonctionnements apparus depuis plus de deux ans à l’IED. Ceux-ci entravent dangereusement la qualité de nos enseignements, le bon fonctionnement de l’institut, rendent la situation insupportable et ne nous donne pas d’autre issue que de nous mettre en grève administrative.
Nous dénonçons depuis 2 ans maintenant la relégation inacceptable des aspects pédagogiques de nos enseignements au profit des aspects strictement financiers comme en témoigne le dernier rapport d’activités, un mépris total pour le calendrier universitaire, des charges administratives trop lourdes, mal coordonnées et non reconnues qui engendrent un malaise et un surcroit de travail des enseignants et des personnels administratifs. La disparition du pôle pédagogique sur le site de l’IED depuis 2 ans et demi (alors même que nous demandons sa réintégration depuis 2 ans) est symptomatique du manque d’intérêt que témoigne la direction de l’IED pour sa mission première : l’enseignement et ses pratiques pédagogiques innovantes. L’absence de visibilité pour les enseignants qui ne sont même pas référencés sur le site de l’IED est préjudiciable pour leur crédibilité et la crédibilité de l’institut.
Nos interventions sont restées sans effet à ce jour. Au contraire, alors que ces dysfonctionnements pourraient être évités avec un minimum d’organisation et de concertation, nous observons des signes inquiétants de dérives accentuées. La direction de l’IED a ainsi décidé de façon unilatérale le remplacement de tous les postes informatiques, le verrouillage de solutions logicielles pour quelques applications Open source inadaptées aux besoins et aux usages des enseignants et des administratifs. En particulier, l’installation du système d’exploitation Linux a des conséquences sur nos pratiques pédagogiques. Ceci aurait demandé une concertation, une formation préalable et un accompagnement des enseignants de l’IED qui, en grande partie, ne sont pas informaticiens. De plus, à l’heure actuelle, bon nombre de logiciels nécessaires à l’enseignement à distance ne sont pas compatibles avec ce système. Ainsi, il est parfois tout simplement impossible d’ouvrir ou d’imprimer dans son intégralité un document envoyé par un étudiant ! Le suivi des étudiants de Master s’avère de plus en plus problématique, des documents ou des logiciels spécifiques ne pouvant être examinés ou installés. Il est difficile d’obtenir l’ouverture d’un compte mail pour les nouveaux collègues, alors même que celui-ci conditionne l’accès aux étudiants et aux personnels de l’institut. Cela correspond, en présentiel, à interdire à un enseignant l’accès à sa salle et à ses documents de cours. Toutes les tentatives de discuter ces choix ou ces positions se sont soldées par des fins de non recevoir. Toujours dans le même registre, des postes informatiques ont été installés dans de nombreuses salles de cours, avec des tables fixées, sous forme de carré. Cette organisation empêche toute possibilité de constituer des groupes ou ateliers et réduit considérablement le nombre d’étudiants qui peuvent s’installer dans la salle. Pourtant, ces salles, sont à l’origine prévues pour accueillir les regroupements de psychologie organisés sous forme d’ateliers. Ainsi en salle D249, seules 14 places sont disponibles alors qu’avant la fixation des tables, on pouvait en accueillir 25. Il en résulte une augmentation du nombre de regroupements et nous nous retrouvons parfois à enseigner à 10 étudiants ! Cela représente un coût non négligeable pour l’université et épuise les enseignants qui multiplient leurs interventions. En ce qui concerne la répartition des charges administratives pour les enseignants, celles-ci ne sont jamais décidées collégialement et en réunion plénière. En psychologie, un enseignant rattaché à l’UFR de psychologie a été nommé responsable de diplôme sans concertation avec les autres enseignants. Par ailleurs, de nombreuses charges ne sont pas prises en compte comme la responsabilité des enseignements des sous-disciplines, l’organisation des regroupements, la relecture de tous les sujets d’examens, la saisie de centaines de notes dans le logiciel Apogée. Ces tâches conditionnent pourtant la bonne marche de l’Institut. Enfin, aucune réunion n’a été organisée par la direction avec l’ensemble du personnel ou bien même avec l’ensemble du personnel enseignant depuis 3 ans. Ces réunions qui permettraient de fédérer l’équipe autour d’un projet commun qu’est l’enseignement à distance manquent cruellement et renforcent le sentiment d’isolement et d’absence de gestion. Il faut souligner que c’est la première fois que nous nous retrouvons dans cette situation.
Ces dysfonctionnements ne concernent pas seulement l’activité des enseignants. Depuis deux ans, les conditions de travail des personnels administratifs se sont particulièrement dégradées. Le service d’accueil n’a plus les moyens de sa mission. Mal informé des indications données aux étudiants et en nombre insuffisant, il ne peut traiter convenablement les demandes administratives des étudiants. Ceux-ci sont promenés d’un numéro de téléphone à un autre, d’une boîte mail à une autre sans toujours réussir à trouver la réponse à leur question. En outre, une organisation incompatible avec le calendrier universitaire impacte sur le travail des gestionnaires de diplôme. Par exemple, il est demandé aux étudiants de Licence de psychologie de s’inscrire à l’IED alors que toutes les notes n’ont pas été saisies et que les jurys de Licence n’ont pas été tenus. Cette situation impacte même le bon fonctionnement des autres composantes. Ainsi les gestionnaires de l’UFR de psychologie sont de plus en plus souvent sollicités par les étudiants de l’IED ne parvenant pas à trouver le bon interlocuteur.
Un contrôle des enseignants et des personnels administratifs s’effectue jusque dans les activités quotidiennes et pèsent d’autant plus fortement que les personnels sont vacataires. En outre, de nombreux personnels statutaires et vacataires subissent des tracasseries sans fin pour se faire payer leurs vacations ou leurs heures complémentaires, quand on ne les soupçonne pas de gonfler leur nombre d’heures ! Ceux qui osent réclamer sont l’objet de tentatives d’intimidation. Cette attitude est insupportable et humiliante alors que nous travaillons sans compter pour assurer un service de qualité. Il faut ajouter à cela les grandes difficultés rencontrées pour la signature des contrats qu’il s’agisse des chargés de cours ou des personnels contractuels. L’évaluation des heures d’enseignement, qui est censée respecter une procédure stricte subit des variations sans justificatif, créant des inégalités entre enseignants pour les mêmes tâches d’enseignement, témoignant d’un manque de rigueur dans la gestion et l’ application des règles décidées notamment par le CA.
On aurait pu espérer que le conseil de l’IED joue son rôle de contrepoids, mais même cette instance est empêchée dans son fonctionnement : transmission tardive des documents, traitement dans l’urgence en fin de séance des points qui nécessitent un débat ; un mépris total des demandes formulées par les élus à plusieurs reprises et reportées sans fin. Des votes de principe sont fréquemment demandés sur des documents provisoires sans que les membres ne voient les documents finaux. Malgré les demandes répétées des élus, les ordres du jour et les comptes-rendus ne sont toujours pas diffusés à l’ensemble des personnels de l’IED.
Il en résulte une situation insupportable pour tout le monde, pour
les étudiants qui n’arrivent pas à soumettre leur problème au bon
interlocuteur, pour le personnel administratif qui ne peut accomplir
sereinement ses missions et les enseignants qui se trouvent harcelés de
questions administratives alors qu’ils voudraient se consacrer aux
questions pédagogiques.
Le manque de cohérence des délais administratifs imposés que ce soit
pour la déclaration des heures supplémentaires, des états de services,
des recrutements, ou pour le délai de réinscription des étudiants
raccourci unilatéralement à une semaine après la publication des
résultats rend la situation tout simplement intenable.
Cette situation ne peut plus durer. Nous sommes actuellement dans un
état d’épuisement et de démotivation qui ne saurait être acceptable
dans un contexte professionnel. Devant l’absence d’écoute quant aux
problèmes que nous avons soulevés à plusieurs reprises, nous ne voyons
pas d’autre solution que de nous engager dans une grève administrative.
Nous ne saisirons pas les notes de deuxième session dans le logiciel
Apogée, nous démissionnerons de nos responsabilités liées à la gestion
de nos diplômes et/ou refuserons d’en prendre la responsabilité jusqu’à
ce que nos revendications soient satisfaites.
Nous demandons aux membres du conseil de l’IED ainsi qu’à la direction
de l’université de prendre toute la mesure de la situation actuelle. Le
conseil de l'IED et la présidence de l'université doivent d'urgence
prendre les mesures qui s'imposent pour remédier à la mauvaise gestion
d’une part et à la dégradation des conditions de travail d’autre part.
Face à tous ces dysfonctionnements, qui génèrent un climat de tension
et de souffrance depuis plus de 2 ans à l'IED, nous estimons que la
direction n’assure pas son rôle et n’a plus sa légitimité.
Dans un nouveau contexte, des mesures pourront être prises afin de
1) stabiliser la situation des contractuels, 2) replacer la pédagogie
au cœur des préoccupations de l’institut et redonner un rôle aux
équipes pédagogiques notamment dans la nomination de leurs responsables
d’enseignements ou de diplômes, 3) redonner aux équipes administratives
des moyens humains et financiers 4) retrouver les capacités d’offrir un
service d’accueil performant, et enfin, 5) rétablir une gestion
transparente de l’IED qui traite chacun à égalité.
Nous demandons à être reçus d’urgence par la direction de l’université
avant que notre décision de grève administrative ne devienne effective,
ce qui sera le cas, en l’état, à compter de la première semaine
d’octobre.
Signataires :
Laurence Conty (MCU), responsable pédagogique des neurosciences,
Lionel Dagot (MCU), responsable pédagogique master psychologie sociale, responsable des équivalences
Jean-Charles Houillon : Professeur associé à mi temps (PAST)
Sophie Jeussaume (MCU), responsable pédagogique de la Licence de droit à distance
Corinna Kohler (MCU), responsable pédagogique de la 3ème année de Licence de psychologie, co-présidente du jury de Licence de psychologie (IED)
Laurence Masse (MCU), enseignante en L2 de psychologie sociale, co-présidente du jury de Licence de psychologie (UFR
Françoise Morange-Majoux (MCU), Responsable pédagogique du Master 1 de psychologie du développement
Elisabetta Zibetti (MCU), responsable pédagogique de la 2ème année de licence de psychologie.
19 collègues de l’IED, personnels administratifs ou enseignants, soutiennent ce mouvement.